Et voilà, vaincu par le fric.

Témoignage de l’un d’entre nous :

Et voilà, vaincu par le fric. Les billets finiront par pomper l’eau de mer, faire de la nuit au soleil et rendre le vent puant.

Après 20 ans avec mon petit voilier de 8 mètres de 1977 (valeur 7000€), à cultiver au pied du fort carré, mes racines antiboises et marines de descendant de familles qui ont fait pour la ville et pour la mer aux siècles précédents, je rencontre ce matin sans préavis, ce matin, cette barrière sur un chemin qui m’était si familier et qui a été cédé par la mairie à la CCI des AM, comme l’ensemble du port pour lequel des profits boulimiques sont désormais souhaités, en dehors de sa gestion publique délaissée par le maire. Concrètement, avec une paye de directeur d’école en fin de carrière, il n’est plus autorisé d’accrocher son bateau au port d’Antibes. Tant d’autres aussi doivent être dans l’embarras pour continuer d’envisager accrocher leur petits bateaux, partenaires fusionnels d’une vie, au port d’Antibes !

Pour commencer, l’abonnement annuel pour approcher du bateau en voiture et stationner devient payant à hauteur de 550€ annuels. Je découvre cela après avoir été informé en janvier que les tarifs préférentiels consentis à tous les locataires des pontons flottants installés dans les années 70 pour la petite plaisance, vont plus que tripler en 4 ans. Pour les 8,25 mètres de mon voilier le tarif va passer de 1500€ annuels à 4800€ annuels. Cette augmentation tarifaire, si elle concerne les environ 400 places des pontons flottants du bassin de petite plaisance, piétine autant de projets de vie passionnels, pour des intérêts d’engraissement financier privés.

Mon projet d’une vie avec ce bateau, s’arrête là, malheureusement. Je vais le mettre en vente, en espérant qu’il quitte cette région où l’accès à la mer est empêchée pour ceux qui n’ont pas de richesse arrogante. Acheté en 2000 et pour lequel j’ai toujours pensé que ce serait à la retraite que je profiterais le plus (dans 4 ans) de mon amour de la mer en petite plaisance, je vais, comme plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de petits plaisanciers de ce port d’Antibes, devoir renoncer pour laisser la place à de plus amples profits pour Riviera Port de la CCI des AM, au sein de laquelle la valse des directeurs des ports laisse penser la difficulté à assumer ce que cette fonction conduit à faire. « Gérer un port à la CCI, ça veut dire s’impliquer à 360° :
– une gestion efficace du port (un bon équilibre entre la rentabilité et l’investissement)
– un maillage entre le port et les commerces de proximité
– l’animation de la filière Nautisme
– la création d’événements, formation,… »

Comme on peut le comprendre à travers ce discours pitoyablement non-marin, s’agissant tout de même d’un port, vive la mer et le vent pour ses voisins ordinaires immédiats, qui l’ont dans la fibre depuis leur naissance… A moins qu’ils n’aient pas les moyens financiers à hauteur de rentabiliser l’argent prêté par les banques pour les investissements envisagés, de faire vivre les commerces suffisamment grassement dans les implantations économiques projetées ou existantes, et qu’ils soient moyennement intéressés par les cabrioles des grands maxi-catamarans images de la finance, par les super rapides emblématiques de pays lointains ou encore par…

J’aimais bien les Voiles d’Antibes, crées 3 ans avant que j’acquière mon voilier, que j’ai suivies pendant toutes ces années, ayant même eu une fois la chance de naviguer sur l’Amadour de Tom Van der Bruggen, et qui n’ont pas eu besoin de rénovation du Port Vauban pour y trouver un écrin de caractère et ainsi attirer la grande sympathie du public et des marins.

Amoureux de la mer, émules des Picasso, Maupassant, Kazantzakis, Prévert qui avez aimé la anse Saint Roch et le vieil Antibes en d’autres temps, qui avez créé le goût touristique pour cette ville, mes ancêtres qui avez été ami de Paul Arène quand il a écrit « le navire des six capitaines » pendant que vous dessiniez en gravure à l’encre de Chine, de la cabane de la pointe de l’Îlette, la vieille ville et ses tours face à la mer sur le rempart bastion Est , lui-même préservé de la destruction par les plaidoiries au conseil municipal de cette époque, d’autres ancêtres qui affrontaient là les faiseurs de profits destructeurs, au prix de leur intégrité physique, après avoir été tabassé dans les ruelles du vieil Antibes par les hommes de main des investisseurs de l’époque qui voulaient créer une Riviera antiboise façon cannoise, ou encore mes ancêtres Barnaud, l’amiral, au retour d’un voyage à la voile à l’époque de la compagnie des Indes, lorsque la anse ne montrait que les embarcations des pécheurs et votre fier voilier de commerce amarré au quai de ce qui a été nommé plus tard chantier naval Opéra, ne venez pas voir ce qu’est devenu Antibes, réserve pour riches arrogants qui sauront bien éteindre toute poésie en ces lieux et stopper toute nature partagée avec ses autochtones trop peu solvables…

Dégouté et réelle envie de vômir.